Un trésor sur le sable

Misère, elle n’ est pas assez rapide. La scélérate, sourde à son appel, a réussit son coup.
Le jeune garçon s’affale de tout son long.
Devant la sournoiserie de la gueuse, elle reste un moment interdite. Médusée, elle voit le gamin se relever et la fille l’empoigner sans ménagement.
Un instant elle pense que cet enfant est peut être celui de cette femme. Pensée vite balayée. Quelle mère provoquerait volontairement la chute de son enfant au risque de l’estropier plus qu’il ne l’ est déjà ? !
Elle accélère ses pas prête à interpeller de nouveau la mendiante quand se tournant vers elle le garçonnet se met à crier

MERE, MEREEEEEEEEEE, J'SUIS LA!!!


Inutile de se retourner pour voir si ce geste de la main et ces cris lui sont bien destinés, elle a compris que le petit cherchait en elle son salut.
Délaissant son panier de victuaille, remontant ses jupes elle se met à courir.
Les pavés des ruelles encombrés de détritus et d’immondices divers sont glissants. Elle doit à deux reprise ralentir pour ne pas tomber. C’est juste le temps qu’il a fallu à un homme qu’elle ne saurait décrire tant sa mise est étrange, pour rejoindre l’ enfant , le libérer de l’ emprise de la ribaude et commencer à tourner les talons.
Chaussures de belle confection, culottes de marin à la couleur douteuse, chemise à jabot dentelé, cheveux sales et hirsutes, elle ne saurait dire si l’homme est un bourgeois infortuné ou un vaurien embourgeoisé. Toujours est-il qu’il a libéré le garçon.
Cessant sa course, juste à peine à quelques mètres de l’ enfant, elle met genoux à terre et lui tend une main.
Autant pour lui faire savoir qu’elle a compris son message et qu’elle va jouer le jeu, que pour donner le change aux deux misérables qui sont encore à portée d’oreille, elle lui crie

SACRIPAN ! MAIS OU DIABLE ETAIS TU DONC PASSE ?

[dans la ruelle près du port]

France se trouve un peu gênée d'avoir parlé ainsi au marin. Rassurée également, car celui-ci n'est animé que de bonnes intentions. La petite, toujours dans ses bras, se tord le cou et cherche son frère, des sanglots dans la voix, les larmes aux yeux.

Pardon, Messire, de vous avoir mal jugé. De nos jours, on n'est jamais trop prudent. Vous entendre appeler mes enfants de la sorte m'a laissé croire que vous étiez mal intentionné ...
Et oui, vous avez effrayé mon garçon, avec cette voix tonitruante que vous avez ....
Excusez-moi, maintenant, je dois le retrouver très vite .... Il ne doit pas être bien loin !

France se détourne, dirige son regard dans la direction où Jean s'est enfui. Mais la foule est dense, les badauds se pressent autour des boutiques, d'autres tiennent conversation au milieu de la ruelle. Nulle trace de l'enfant ...

Elle tente de rassurer la fillette. Ne t'inquiète pas, Lucie, il va revenir bien sûr. Et s'il tarde trop, je vais le retrouver.
Afin d'apaiser l'enfant, elle lui chantonne une comptine au creux de l'oreille. France avance dans la ruelle, gardant cependant à l'esprit que Lucie est affamée, même si elle n'y pense plus, toute à son désespoir d'avoir perdu son frère. Elle s'arrête un instant devant un étal, y achète du pain et quelques confiseries, toujours aux aguets cependant.
Puis, elle offre ses achats à la petite fille, toujours blottie contre elle : mange petite, mais gardes-en un peu pour Jean. Nous ferons un meilleur repas, tout à l'heure .... tous les trois !
Elle sourit à l'enfant, repousse une mêche rebelle, et lui caresse la joue, tandis que Lucie commence à manger un morceau de pain, timidement, des sanglots lui soulevant toujours la poitrine.

[Près du port, dans une ruelle]


Le grand monsieur au chapeau est drôlement gentil il lui a donné son mouchoir qu'elle avait tombé. Pourquoi il va pas lui chercher Jean avec France, pourquoi tout les grands s'en fichent que son frère soit parti en la laissant toute seule au monde.
Dans son petit coeur de six ans, Lucie ne comprend pas pourquoi personne l'aide. Elle continue à murmurer ... il est où Jean .... regarde s'éloigner doucement le monsieur à la grosse voix qui lui fait un signe de la main, pendant que France l'entraine à travers tous les gens qui parlent fort et se bousculent par moment. Le monsieur il marche pas loin derrière, il va les aider à chercher Jean ?

La dame chante... ça lui rappelle Jean quand il lui chante aussi des chansons pour qu'elle s'endorme le soir.

mange petite, mais gardes-en un peu pour Jean. Nous ferons un meilleur repas, tout à l'heure .... tous les trois !

Elle prend le pain que lui donne France mais ne peut retenir ses sanglots en pensant à Jean. S'en est trop pour le petit bout qui ne peut plus se contenir et éclate en sanglots, se mettant à gesticuler dans les bras de la jeune femme, comme si elle voulait descendre pour courir apres son frère.

- Jean !!! je veux Jean !!! jean !!! reviens Jean !!!!

Les sanglots silencieux ont laissé place à un gros chagrin qui font sortir les larmes de l'enfant faisant se retourner les passants intrigués. Le grand monsieur et la dame doivent retrouver son frère, il lui a promis de revenir et il est toujours pas là.

- Je veux Jean !!! je veux mon grand frère !!!

Elle aimerait pouvoir descendre, partir en courant au milieu des gens pour aller chercher son frère et le ramener avec elle. Elle sait que même s'il est plus grand que elle, Jean est encore un petit garçon et que les grands sont bien plus forts que lui, même si c'est le plus malin des grands frères.

[Dans une ruelle pres du port]


Le capitaine écoutait la femme sans quitter l'enfant des yeux. Cette petite a l'air bien triste pensait il.

Pardon, Messire, de vous avoir mal jugé. De nos jours, on n'est jamais trop prudent. Vous entendre appeler mes enfants de la sorte m'a laissé croire que vous étiez mal intentionné ...
Et oui, vous avez effrayé mon garçon, avec cette voix tonitruante que vous avez ....
Excusez-moi, maintenant, je dois le retrouver très vite .... Il ne doit pas être bien loin !

L'homme jeta un regard vers la rue dans la direction où il avait vu l'enfant courir et regarda la mère à nouveau.

- j'ai rendez vous dans une taverne à quelques centaines de pas d'ici... si j'aperçois votre fils je vous le ramènerai. Le quartier, un peu plus loin est un vrai coupe gorge et il ne fait pas bon pour un gamin d'y trainer s'il ne sait pas se défendre.

Il suivit des yeux la mère et la fillette pendant qu'elles s'éloignaient et fit un petit signe de la main à l'enfant. Quelque chose le tracassait dans le regard de cette môme... il en voyait pourtant des gosses, que ce soit des gosses de riches, de paysans ou de pauvres gueux, mais là cette enfant avait quelque chose qui l'intriguait.

Peut être que son frère avait peur des voix brutales parce que son père en avait une et le battait ? Son regard se porta sur l'horloge fixée en haut d'un bâtiment et le sortit d'un coup de ses rêveries.

Par sainte Jeanne ... le Drôle .. si je continue à trainer comme ça il sera parti. Tout en ruminant il se remit en marche dans le sillage de ses deux rencontres. La rue était de plus en plus animée à mesure que l'heure du déjeuner approchait. L'homme pressa le pas et passa à côté de la femme et la fillette quand il l'entendit pleurer et réclamer son frère.

- Je veux Jean !!! je veux mon grand frère !!!

Il marqua un temps d'arrêt et la regarda, derrière lui, puis interpela un gamin qu'il avait vu quelques fois dans le quartier quand il y passait.

- tu veux gagner une pièce toi ? alors viens là j'ai quelque chose à te demander.

[dans la ruelle, près du port]

Citation :

j'ai rendez vous dans une taverne à quelques centaines de pas d'ici... si j'aperçois votre fils je vous le ramènerai. Le quartier, un peu plus loin est un vrai coupe gorge et il ne fait pas bon pour un gamin d'y trainer s'il ne sait pas se défendre.

Mille mercis, Messire. Je compte sur vous. Mais, il n'a pas dû aller bien loin ... il ... il ... boîte ! Tout au plus, a-t-il dû se cacher sous une porte cochère, ou dans une arrière-cour !

Lucie pleurait à gros sanglots, et cherchait à descendre, pour elle aussi courir à la recherche de son frère. France avait de plus en plus de mal à la tenir. Mais, elle ne pouvait la laisser à terre, au risque de la voir s'enfuir, à son tour. Ces deux enfants ne se rendaient pas compte des risques qu'ils prenaient à errer, seuls, dans les rues.

Ecoute Lucie, nous allons retrouver ton frère ... Et, tu as entendu le capitaine ? il a dit, que s'il le voyait, il le ramènerait ! Donc, ne pleure plus ... dans quelques minutes, vous serez à nouveau ensemble ...

France espérait de tout coeur que toute cette histoire allait avoir une fin heureuse. Elle voulait croire que Jean ne s'était pas mis dans l'embarras ... Elle imaginait bien pourquoi il s'était enfui à l'approche du marin. Il avait dû voler sur le bateau, et craindre que celui-ci ne vienne lui demander des comptes.

Pourvu qu'il n'ait rien fait de tel, par ici ... parce que si quelqu'un alerte la prévosté ... que pourrais-je faire ? se demandait-elle. Elle connaissait bien quelques personnes influentes à Saint Pierre, mais l'aideraient-ils à sauver un petit voleur des rues ? Rien n'était moins certain. Elle s'aperçut que la petite la regardait fixement, et lui adressa un sourire, qu'elle espérait réconfortant, tout en sachant que les enfants ont un sixième sens, et sentent quand les adultes sont peu sûrs d'eux.

[Dans une ruelle pres du port]


- Ce s’ra une pièce m’sire

Thimotée regardait sans sourciller l’homme vêtu richement qui lui demandait de surveiller sa monture. Braies et chemises de belles qualités, bottes, mantel et chapeau, son allure précieuse ne laissait aucun doute sur sa classe. Un noble, avec un ton aussi agréable et compatissant qu’une petite boulangère à qui il viendrait de voler trois miches sur son étal.

- voila une pièce gamin et veilles bien sur lui le temps que je revienne. Je n’en ai pas pour bien longtemps.

La voix était sèche et uniforme et quand l’homme s’éloigna, le gamin le suivit du regard avec un petit sourire aux lèvres.
Il baissa les yeux et ouvrit la main regardant avec envie la pièce. Les vêtements usagés qu’il portait, que ce soit ses braies, la chemise rapiécée à l’épaule, la veste qui laissait apparaitre ses frêles poignets, ou encore ses chaussures en plus ou moins bon état, attestaient de sa situation. Ses frères et sœurs étaient bien trop nombreux, comme dans presque toutes les familles, pour que ses parents puissent le vêtir correctement.

Du haut de ses 14 ans, le vol était donc devenu son quotidien, avec les menus services qu’il soutirait aux adultes, et quand l’homme s’était approché pour lui demander de surveiller son cheval le gamin n’avait pas hésité une seconde.
Il s’approcha prudemment de la bête attachée à un anneau fixé au mur et passa sa main sur son flanc, avant de venir lui caresser l’encolure. Dans les tons gris, la bête était belle et il s'imaginait la chevauchant dans la forêt, bravant tous les dangers qui se dresseraient devant eux.

- t’es bien beau toi, tu dois filer comme le vent puis regardant dans la direction où était parti l’homme … c’est bien dommage pour lui.

Soupirant il reprit sa place, assis sur le rebord de la fontaine.

La boulangère a des écus qui ne lui coûtent guère, elle en a, je les ai vus... les pièces tournoyaient doucement dans sa main, tournant et retombant dans sa paume pendant qu’il continuait à chantonner… j'ai vu la boulangère aux écus .. j’ai vu la boulangère... tiens le capitaine pensa t il en regardant l'homme qui se tenait non loin de lui.

- merci gamin pour le service.

Il leva les yeux pour voir le cavalier remonter en selle et resta quelques secondes rêveur en le regardant s'éloigner... un jour lui aussi aurait un cheval qui l'emmènerait sur les chemins.

- tu veux gagner une pièce toi ? alors viens là j'ai quelque chose à te demander.

La voix du Capitaine ! gagner une pièce .. c'était pas la question à lui poser. Un grand sourire aux lèvres il s'avança vers l'homme qu'il avait croisé bon nombre de fois dans le quartier.

[Dans une ruelle pres du port]

Flib connaissait le gamin, pour lui avoir quelquefois demandé des petits services. Il le savait débrouillard et prêt à tout et surtout il avait un énorme avantage, il connaissait la ville comme sa poche et avait ses entrées dans les coupes gorges. Au fil des rencontres, l'homme avait pris le gosse en affection et avait toujours une pièce pour lui.

Il posa sa main sur son épaule et l'entraina vers la fontaine.

- je voudrai que tu me retrouves un boiteux, c'est un gamin plus jeune que toi et sa mère et sa petite sœur le cherchent.
Tu vois cette femme là bas avec la gamine ? c'est sa mère.

Il regarda dans la direction de la jeune femme et continua.

- j'ai bien peur qu'il ne se soit dirigé vers les quartiers mal famés et je veux que tu ailles veiller sur lui .. et le ramener à sa mère ou à moi. .

Il désigna d'un signe de tête le bout de la rue.

- je dois voir le Drôle là bas tu pourras m'y trouver et apres je serai sur le bâteau. Je pense lever l'encre dans deux jours le temps de charger quelque cargaison…. il eut un petit sourire en pensant à ses moussaillons en train de briquer le pont et espérait pour eux que chose fût faite. Deux jours à travailler et nettoyer le navire ne leur ferait pas de mal.

Il sortit un louis de sa poche et le donna à Thim. Il savait qu'il pouvait lui faire confiance et qu'en cas de problème le capitaine serait là, dans le bon ou dans le mauvais sens.

Le sacripant a bien compris son message, et il se jette dans ses jupes comme un fils soulagé de retrouver sa mère.
Bien jouer son rôle, ne pas câliner le coquin, mais le sermonner un peu vivement comme toute bonne mère inquiète mais courroucée d’avoir eu à courir après son rejeton. Le tout en tentant une caresse preuve d’amour maternel rassuré et sans condition offert.

Main donc tendue, yeux froncés et regard grondeur elle lui lance .

Il suffit maintenant vilain garçon que tu es, n’as-tu donc cesse de me faire courir ainsi ?

Mots tout juste prononcés, qu’elle prend envie de rire. « Baronne », il lui sert du « Baronne et du Duchesse » et se perd dans des explications toutes aussi compliquées et mensongeuses que douteuses.
Les deux traine-misères disparus au coin de la ruelle, elle n’a plus rien à craindre pour lui
Ne lui laissant pas le temps de filer, elle l’attrape fermement par le bras et se penche vers lui

Dis donc, jeune homme, avant d’être une Baronne ou une Duchesse, je suis avant tout une personne pas si sotte que tu peux le penser.
Tu ne me feras pas croire que tu as mille écus en poches. Que ta mère, la vraie, soit souffrante, ça je veux bien, mais que misérable comme tu en as l’air, elle puisse te confier une telle somme, juste pour un médecin, ça j’en doute !
Et, inutile de loucher ainsi sur ma bourse , elle ne contient que peu de monnaie. Mais cependant juste assez pour payer le médecin que nous allons aller quérir ensemble.
Qu’en penses tu ?

Habituée, de par son ancien poste de préceptrice auprès des enfants d’un général, aux réactions pas toujours coopérantes des garnements en mal de sottise, elle resserre un peu plus son étreinte sur le bras du jeune garçon et l’entraine vers le nouveau dispensaire dont on lui a parlé la veille.

Allez mon garçon, on ne traine pas, ta mère, à t'en croire, peut mourir si on ne trouve pas rapidement ce médecin.

Un petit sourire et un clin d’œil plus tard, ils quittent la ruelle pour le dispensaire .

[à quelques ruelles du port]

- je voudrai que tu me retrouves un boiteux, c'est un gamin plus jeune que toi et sa mère et sa petite sœur le cherchent.
Tu vois cette femme là bas avec la gamine ? c'est sa mère.

Pour sûr qu'il la voyait la femme et même qu'il arrivait pas à en détacher ses yeux. La même chevelure que celle de Lisa, celle qu'il aimait bien à croiser quand il allait trainer dans le quartier vers la plage. La petite elle, avait un air marrant avec son bonnet et elle lui fit penser à la soeur de Firmin. Elle devait bien avoir le même âge et il se demandait si elle était aussi teigne qu'elle.

Retrouver son frangin et veiller sur lui ? voila que le capitaine le prenait pour une nounou maintenant. Mais bon si le gamin était vers le quartier de la plage le Thim voulait bien aller le chercher. Peut être il apercevrait la Lisa et ça serait pas désagréable. La pièce que l'homme mit dans sa main acheva de le décider.

- à vos ordres capitaine je vais ramener votr' brebis égarée à sa mère... si le loup l'a pas mangé bien sûr

Il fit un clin d'oeil au capitaine et tourna le dos pour se diriger vers le quartier que le marin lui avait désigné. Pas besoin de description pour lui, il connaissait tout le monde. Un étranger serait facilement repérable même dans la foule.

Il afficha un sourire malin en regardant l'étal qui se trouvait à deux marchands plus loin. L'étal du père Jules. Et comme pour le narguer le Jules avait posé de belles miches qu'il venait sans doute de faire. Thim en salivait et il n'écouta que son estomac en voyant le Jules se retourner pour prendre une caisse rempli de pains. Bha un de plus ou de moins il le verrait pas.
Il s'élança et en moins de temps qu'il ne fallait pour le dire, attrapa la miche la plus proche du bord de l'étal et disparut à toute allure au milieu de la foule qui se pressait, ignorant ceux qui rouspétaient quand il les bousculait, pour ne ralentir sa course qu'une fois tourné le coin de la rue.

Il se retourna rapidement pour être sûr que personne ne le suivait avant de reprendre son pas rapide, quand il bouscula quelqu'un et la miche de pain lui échappa pour rouler par terre.

- par la barbe du diable !!! il allait montrer son mécontentement à l'imprudent quand il se trouva nez à nez avec un mome.... peux pas faire attention non ! il se baissa et ramassa rapidement sa miche qu'il frotta un peu pour lui enlever la poussière et regarda le drôle en fronçant les sourcils car il semblait avoir pris un coup à la figure.

j'suis Jean , le boiteux. Dis t'as pas vu une gamine avec une bourgoise? la p'tite c'est ma soeur. elle a un bonnet et elle est toute p'tite. La bourge elle est..elle est belle avec les cheveux bizarres, comme des carottes. tu les as vu, dis?

Jean le boiteux ? le capitaine lui a parlé d'un mome mais pas d'un boiteux. Thim le dépassait d'une bonne tête et il le regarda de la tête au pieds avant de répondre d'un air méfiant.

- p'têt' bien qu'j'ai vu une femme comme tu dis avec une gamine. il observa le gosse ... tu t'es battu ? le quartier est plutôt animé ici et çà m'étonnerait pas. J'm'appelle Thimotée mais on me surnomme Thim. Tu t'es perdu que tu recherches ta mère et ta soeur ?

Il regardait le pain chaud. Le garçon, Thim, passait la main dessus dans un geste agacé. Pourtant c'était bien lui qui l'avait bousculé et pas l'inverse. L'estomac de Jean se manifesta si fort que le petit pouvait l'entendre. Même la bonne odeur venait titiller ses narines pourtant en mauvais état. Il ne quittait pas le pain des yeux pendant que Thim répondait.


- p'têt' bien qu'j'ai vu une femme comme tu dis avec une gamine.

"pourvu que c'est elles " pensait Jean. Je dois me mettre le Thim dans la poche, "seul j'vais pas y arriver."

Thim, t'es d'ici, t'habite ici?

Le pain...son estomac faisait de forts gargouillis. Il espérait que Lucie était repue et pensait qu'il lui faudrait voler une belle miche aussi pour les jours à venir.

Les rues étaient désespérément agitées. Il regardait de tous cotés de peur de voir le capitaine ou la bourgeoise revenir. Enfin la bourgeoise ne l'inquiétait pas trop. Elle avait le soldat dans le giron et avant que l'autre s'en dépêtre, Jean aurait le temps de se marier.

Un petit pincement au coeur. Pas vraiment un regret mais comme un souvenir du temps où il était maitre des rues qu'il parcourrait. Ici il était un peu perdu. Se rendre compte soudain qu'on n'est pas vraiment un homme ne faisait pas du bien. Mais il se reprit, fierté du mâle en devenir, du petit garçon qu'une mauvaise patte n'a jamais empêché de rêver.

Lucie, la retrouver et s'enfuir encore, plus loin.

Il se dandinait d'une jambe boiteuse sur l'autre. Fallait il que la nature s'en mêle aussi...un proche ferait l'affaire mais il avait peur que Thim disparaisse, le laissant sans partenaire d'un instant, sans soutien pour retrouver Lucie. Il cherchait dans le regard de l'adolescent cette lueur qui dit qu'on peut faire confiance aux gens. Il cherchait et il trouva. certes, on voit dans les autres ce qu'on espère y trouver. Mais Jean n'avait que peu de choix et il était fatigué. fatigué de courir, fatigué de fuir, fatigué de craindre les uns et les autres. Il décida! Thim était bon, Thim allait l'aider.

montres moi ou qu'tu les as vu ste plait! La carotte c'est pas not' mère. elle veut emmener ma sœur , la vendre pour des sous.

Mentir..toujours mentir. Il avait donné sa confiance à Thim mais mentir était devenu une seconde nature. Quelque fois il ne savait plus si il racontait vrai ou pas tant il mentait souvent.Il mentait à tous, Il se mentait à lui même surtout.

[sur la plage, le même jour Quasi et Aimelin]


Sa pelle en guise d’arme, Aimelin creusait trou apres trou, à une profondeur raisonnable, faisant attention de ne pas aller déranger les voisins du dessous qui vivaient la tête en bas et ne verraient peut être pas d’un bon œil les fouilles du jeune gars en voyant sortir une pelle du sol.

A quelques pas de lui, sa douce se battait avec le sable qui retombait aussitôt dans le trou qu’elle s’évertuait à creuser, et il lui jetait de temps à autre un regard amusé, faisant mine de ne pas voir ce qui se passait.
Le cri qu’elle poussa le fit sursauter et il lacha sa pelle.

- Nom d'un nobliau si je n'suis pas sourd ce soir c'est que le bon Dieu dans sa bienveillance aura eu pitié de moi.

Il regarda Quasi et se mit à rire devant sa fausse mine boudeuse

Vite, viens m'aider, j'ai un trésor, j'ai un trésor!

Il éclata de rire en la voyant sauter sur place et être heureuse comme si … comme si elle avait trouvé un trésor. Un trésor ? Aime la regardait en haussant les sourcils d’un air étonné et s’approcha du trou.

- un trésor tu es sûre ?

Il s'agenouilla au bord du trou et commença à gratter un peu avec les mains afin de voir ce qu'elle avait trouvé. Il fit une grimace, sentant soudain quelque chose de mou et se mit à plat ventre pour mieux accéder au fond du trou, et eût un petit mouvement de recul.

- y'a un truc là … qu'est ce que ..

Il poussa soudain un cri et enfonçant son bras un peu plus dans le trou.

- ahhhhhhh quelque chose me tire !!!!

Il fit mine de se débattre et sortit sa main dans laquelle se trouvait une grosse algue d'un vert foncé et roula sur le dos, jetant l'intruse à quelques pas de eux en riant, tout en regardant sa fiancée qui semblait lui reprocher la frayeur qu'il lui avait faite.

- tu as vu ce monstre ? j'ai bien cru qu'il allait me dévorer le bras et m'entrainer au fond de ce trou que tu as creusé !

Voyant son air il se mit à rire de plus belle.

[dans la ruelle près du port]

Lucie commençait à se faire lourde dans les bras de France, mais la jeune femme n'osait la poser à terre. Elle craignait que la petite se sauve, elle aussi.
France continuait d'avancer doucement, son regard balayant la ruelle. Il y avait toujours beaucoup de monde, et il était difficile de distinguer un enfant au milieu de toute cette foule. De temps à autre, elle croyait voir une tête ébouriffée, un garçon qui pouvait être Jean. Mais, à chaque fois, elle soupirait de déception, l'enfant en question ne boitait pas, ou était accompagné, et ne ressemblait jamais vraiment à celui qu'elle cherchait.

Citation :

le monsieur au chapeau il va le retrouver Jean mais il va pas le gronder dis !

Non, non, Lucie, ne t'inquiètes pas, il ne va pas le gronder !

Afin de changer les idées de la peite fille, France décida de lui faire parler de sa jeune vie.

Dis-moi Lucie ? que faisais-tu avant de venir ici ? tu habitais où ? dans une grande ville comme ici ? avec tes parents ?

Une agitation soudaine attira le regard de la jeune femme. Elle pressa le pas, tout en continuant à parler. Approchant du groupe qui s'était formé, elle fut une fois de plus déçue : juste des femmes qui se querellaient. L'une avait une étoffe à la main, et la seconde la lui chicanait. Encore quelques secondes, et elles allaient en venir aux mains, leur énervement attisé par la foule, qui aimait se délecter de ce genre de situation.
France haussa les épaules, et s'écarta.
Elles se trouvaient maintenant à quelques ruelles du port. France hésita quelques instants sur la direction à prendre. D'un côté, se trouvait le dispensaire, de l'autre l'église. Elles s'étaient bien éloignées du port. En réfléchissant, elle se dit que Jean n'était sûrement pas allé vers le dispensaire, où se trouvaient bon nombre d'adultes. L'église, par contre ....
Alors qu'elle allait prendre la ruelle y menant, elle repéra, de loin, deux garçons immobiles, semblant discuter. Elle était trop éloignée pour distinguer leurs traits. Elle décida donc d'aller vers eux ....

[à quelques ruelles du port ]


L'avait pas idée de lui faire tomber le pain ; d'accord il l'avait volé mais fallait bien qu'il mange lui aussi. Il observait le gosse en face de lui, méfiant comme il l'était toujours depuis qu'il vivait dans la rue. Il fallait apprendre à reconnaitre les gens, ceux qui sont de ton côté ou ceux qui feront tout pour t'emmener à la police.

Le boiteux était pas d'ici c'était certain mais c'était un gosse des rues puis il faisait quoi ici tout seul ? Il devait avoir une bonne raison pour avoir laissé sa petite sœur. Il pensa au capitaine et à sa pièce tout en observant Jean.
Le regard de Jean sur le pain ne lui échappa point, il avait trop l'habitude de ceux qu'il croisait tout le temps pour ne pas comprendre les regards des autres. Il n'avait pas du manger depuis quelques heures et c'est que donc la rousse était pas sa mère. Le boiteux avait pas l'esprit tranquille à regarder partout, il avait peur. Thim regarda derrière lui et revint sur Jean qui se dandinait devant lui.

C'était bien ce gosse dont lui avait parlé le capitaine il pouvait pas mentir ça se voyait. Il avait promis au Capitaine de le retrouver et il avait reçu une pièce. On a beau être pauvre et un gamin des rues l'honneur est là quand on accepte quelque chose.

montres moi ou qu'tu les as vu ste plait! La carotte c'est pas not' mère. elle veut emmener ma sœur , la vendre pour des sous.

Pendant que le gamin lui parlait il avait arraché un morceau de la miche et leva les yeux étonné.

- la vendre ? t'es sûr ? la rousse avait l'air de ces dames qu'il croise et qui font plutôt le bien que le mal. Et la fillette n'avait pas l'air de vouloir s'enfuir non plus.

Il tendit le morceau de pain à Jean et se sentit un peu responsable de lui. Un premier sourire s'afficha sur son visage pendant qu'il le regardait mordre dans le pain.

- allez t'inquiètes pas on va la retrouver ta sœur je crois savoir où elle est.

Il allait l'emmener vers la fontaine, et si la femme était partie ils la chercheraient et il en profiterait aussi pour passer à la taverne où le capitaine se rendait pour lui dire qu'il avait retrouvé le boiteux.

Hein ? ... Pardon ? ....

A cet instant seulement, France réalisa que quelqu'un lui parlait. Il s'agissait d'une jeune femme, aux longs cheveux, vêtue de couleurs chatoyantes. Elle avait un physique agréable, et son sourire ainsi que ses yeux noirs pétillants inspiraient confiance. Elle semblait aimer les enfants, et d'ailleurs parlait à la petite.

Citation :

Quelle jolie petite fille !

France sourit à la femme et lui répondit. N'est-ce pas ? Elle est ravissante, en effet, quoiqu'un peu sauvage ! Mais, nul ne lui en voudra : elle est prudente et ne parle pas aux inconnus ...
Puis-je vous rendre service ?

Tout en parlant, France ne quittait pas des yeux les deux garçons, en grande discussion. Elle était encore trop loin pour distinguer leurs traits, et n'aurait pas voulu qu'ils s'éloignent avant qu'elle les ait vu de plus près. Elle songea alors, à se débarrasser de l'inconnue. La petite Lucie, toujours blottie dans ses bras, ne pipait mot. Elle allait se décider à partir, sans attendre la réponse de la femme, lorsque les deux garçons se mirent à marcher ...

Toujours préoccupée par les deux garçons qui discutaient, France n'avait pas trop prêté attention aux propos de la jeune femme, en face d'elle.

Citation :

Moi je veux rester avec France parce qu'elle m'a promis de retrouver Jean et puis Jean il veut pas que je la quitte.

Les propos de Lucie la ramenèrent à la réalité.

Hein ? Comment ? Bien sûr que tu vas rester avec moi, Lucie ! Pourquoi dis-tu cela ? Pardon, Damoiselle, qu'avez vous dit ? Je ne vous ai pas entendue ...

Détournant aussitôt son attention de Mahault, elle s'adressa à nouveau à Lucie.

Dis, Lucie, regarde là-bas ! Elle lui désigna du doigt, les deux garçonnets ... N'as-tu pas l'impression ... on dirait Jean ...

Elle allait reprendre sa marche, quand l'inconnue la saisit par le bras.

Mais, que voulez-vous à la fin ? France était décidée à ne plus être aimable du tout. Cependant, levant le regard vers son interlocutrice, elle se rendit compte que celle-ci ne souriait plus du tout ....